Escadron de Chasse 2/5 « Île-de-France »
Le 2/5 « Île-de-France » est une unité emblématique de l’Armée de l’air française, dont l’histoire est profondément liée à celle des Forces Aériennes Françaises Libres (FAFL) et aux plus grandes pages de la défense nationale. En 2021, l’escadron a célébré ses 80 ans d’existence à la base aérienne 115 d’Orange-Caritat, théâtre historique de son rayonnement et de sa transformation.
C’est par un décret du général de Gaulle, le 20 octobre 1941, que le Groupe de Chasse n°2 des FAFL est créé en Grande-Bretagne. Baptisé dans la RAF « Free French Squadron 340 », il rassemble deux escadrilles au nom chargé d’histoire : « Paris » et « Versailles ». L’escadron s’équipe alors des mythiques Supermarine Spitfire, l’avion qui deviendra le symbole des combats aériens alliés durant la Seconde Guerre mondiale.
Le GC 2 « Île-de-France » s’illustre notamment lors de la couverture aérienne du Débarquement en Normandie le 6 juin 1944. Ses pilotes, parmi les plus aguerris, participent à plus de 7 100 sorties, remportant 75 victoires aériennes tout en déplorant la perte de 38 camarades. À ses côtés, d’autres groupes prestigieux des FAFL font leur marque : le GC 1 « Alsace » (341 Squadron), le GC 2 « Normandie » (puis Régiment de chasse Normandie-Niémen) et le Groupe de bombardement « Lorraine » (342 Squadron).
De la guerre à la guerre froide : évolutions techniques et tactiques
Après la victoire alliée, le GC 2 est intégré à la 5e Escadre de chasse en mai 1946. Il change alors d’avions pour des Bell P-63 Kingcobra américains, puis s’engage dans la guerre d’Indochine de 1949 à 1951, période au cours de laquelle l’unité est décorée de la fourragère aux couleurs du drapeau français, agrémentée de trois palmes de bronze, témoignage de ses citations à l’ordre de l’armée.
C’est en janvier 1951 que le groupe devient officiellement l’Escadron de chasse 2/5 « Île-de-France », s’installant durablement sur la BA 115 d’Orange. Les avions se succèdent alors rapidement : De Havilland Vampire FB Mk5, Dassault MD 452 Mystère II, MD 454 Mystère IVA, puis le Super Mystère B2 dans les années 1960. L’escadron prend part à la modernisation progressive de l’aviation de chasse française, en s’adaptant aux exigences tactiques de la guerre froide.
Mirage III, Mirage F1 et la modernisation des années 1980
Le 2/5 reçoit ensuite le Mirage III C, un des fleurons de la chasse française à réaction, suivi du Mirage F1, qui assurera notamment des missions variées de défense aérienne, reconnaissance et appui aérien.
Mais c’est surtout à la fin des années 1980 que le 2/5 vit un tournant majeur : l’arrivée du Mirage 2000 C. La 5e Escadre de chasse est l’une des premières à être équipée de ce biréacteur polyvalent, au standard RDI (Radar Doppler à Impulsions), renforçant de manière significative ses capacités de détection et d’engagement.
Mais c’est surtout à la fin des années 1980 que le 2/5 vit un tournant majeur : l’arrivée du Mirage 2000 C. La 5e Escadre de chasse est l’une des premières à être équipée de ce biréacteur polyvalent, au standard RDI (Radar Doppler à Impulsions), renforçant de manière significative ses capacités de détection et d’engagement.
Le Mirage 2000 C RDI réceptionné en 1989 offre au 2/5 des capacités accrues : radar à impulsions avec portée portée accrue (jusqu’à 70 NM) et fonction Look Down / Shoot Down, capacité de tir du missile air-air S530D, ainsi qu’une polyvalence sur les missions air-air et air-sol.
Les missions principales de l’escadron se répartissent aujourd’hui en trois axes :
Instruction : Le 2/5 est le centre de formation initiale des pilotes sur Mirage 2000 C et B. Après leur passage sur simulateurs, les jeunes pilotes y effectuent leur transformation opérationnelle avant d’être envoyés sur leurs bases d’affectation.
Permanence opérationnelle (PO) : Un Mirage 2000 C armé et prêt à décoller est maintenu en alerte 24h/24, 7j/7, afin d’intervenir en quelques minutes pour assurer la police du ciel dans le Sud-Est de la France.
Opérations extérieures (OPEX) : L’escadron participe activement à de nombreuses missions en Afrique, au Moyen-Orient et dans les Balkans.
Opérations extérieures (OPEX) : L’escadron participe activement à de nombreuses missions en Afrique, au Moyen-Orient et dans les Balkans.
Depuis 1997, le 2/5 est en première ligne pour la formation des pilotes de chasse sur Mirage 2000. Après une phase théorique approfondie à l’ETIS (Escadron Technique d’Instruction Sol) à Luxeuil, où le stagiaire étudie en détail la mécanique, l’électronique et l’avionique du Mirage 2000 via une cellule « Cristal », les instructeurs-chefs de patrouille assurent une formation rigoureuse en vol.
Les jeunes pilotes y apprennent tout le spectre des missions : vol en formation, voltige, vol de nuit, navigation à très basse altitude, combat air-air. Le passage au solo, étape cruciale, est un moment fort, récompensant des dizaines d’heures de travail rigoureux.
Les jeunes pilotes y apprennent tout le spectre des missions : vol en formation, voltige, vol de nuit, navigation à très basse altitude, combat air-air. Le passage au solo, étape cruciale, est un moment fort, récompensant des dizaines d’heures de travail rigoureux.
Environ 20 pilotes sont formés chaque année, tous français depuis quelques années, avant de rejoindre leurs escadrons d’origine sur Mirage 2000D ou 2000-5. Certains reviennent ensuite à Orange pour se perfectionner au ravitaillement en vol, compétence indispensable en OPEX.
Permanence opérationnelle : la sentinelle du ciel
Le dispositif de permanence opérationnelle est un pilier de la défense aérienne française. Le 2/5 contribue à la protection souveraine de l’espace aérien dans sa zone d’action, armé de deux missiles Magic II à guidage infrarouge et des canons DEFA de 30 mm.
Lors d’une alerte (« scramble »), les pilotes et équipes au sol doivent être opérationnels en moins de cinq minutes, prêts à intercepter tout aéronef suspect. Ce travail de haute vigilance est coordonné en temps réel avec le Centre de détection et de contrôle (CDC) de Lyon-Mont Verdun.
Lors d’une alerte (« scramble »), les pilotes et équipes au sol doivent être opérationnels en moins de cinq minutes, prêts à intercepter tout aéronef suspect. Ce travail de haute vigilance est coordonné en temps réel avec le Centre de détection et de contrôle (CDC) de Lyon-Mont Verdun.
Engagements opérationnels
L’histoire du 2/5 est riche en opérations majeures :
Opération Daguet (1990-1991) : Les Mirage 2000 du 2/5 décollent d’Istres pour se déployer en Arabie Saoudite, participant aux missions de supériorité aérienne et d’escorte lors de la Guerre du Golfe.
Opération Alysse (1992-2003) : Participation à la coalition pour l’interdiction aérienne au-dessus du sud de l’Irak, notamment avec la défense aérienne stationnée en Arabie Saoudite.
Opérations Crecerelle et Deny Flight en Bosnie (1993-1995) : Application de la zone d’exclusion aérienne, frappes au sol et soutien à la force onusienne.
Opération Barkhane (2015-2022) : Engagement dans la lutte contre les groupes terroristes au Sahel, avec des missions de reconnaissance, escorte et appui.
Opération Alysse (1992-2003) : Participation à la coalition pour l’interdiction aérienne au-dessus du sud de l’Irak, notamment avec la défense aérienne stationnée en Arabie Saoudite.
Opérations Crecerelle et Deny Flight en Bosnie (1993-1995) : Application de la zone d’exclusion aérienne, frappes au sol et soutien à la force onusienne.
Opération Barkhane (2015-2022) : Engagement dans la lutte contre les groupes terroristes au Sahel, avec des missions de reconnaissance, escorte et appui.
Escadrilles et traditions
L’EC 2/5 est structuré en trois escadrilles dont les noms historiques ont été mis à jour en 2012 :
C46 « Trident » (ex « Paris »)
SPA 124 « Jeanne d’Arc » (ex « Vincennes »)
SPA 84 « Tête de Renard » (ex « Versailles »)
C46 « Trident » (ex « Paris »)
SPA 124 « Jeanne d’Arc » (ex « Vincennes »)
SPA 84 « Tête de Renard » (ex « Versailles »)
Chacune de ces escadrilles porte un héritage riche, mêlant tradition et modernité.
Célébrations des 80 ans de l'Escadron de Chasse 2/5 "Île-de-France"
Pour marquer dignement les 80 ans de l’Escadron de Chasse 2/5 « Île-de-France », un impressionnant plateau d’exposition statique avait été soigneusement organisé, accompagné d’un programme riche en démonstrations aériennes spectaculaires. Dès les premières heures du matin, les visiteurs ont eu l’opportunité d’arpenter la zone d’exposition, découvrant de près une large palette d’appareils issus de différentes époques et unités. L’arrivée des derniers avions a apporté un sentiment d’effervescence, accentuant l’ambiance festive et solennelle de cet événement.
Parmi les participants, plusieurs fleurons de l’Armée de l’Air étaient présents. Deux Rafale issus de l’escadron 3/30 « Lorraine » ont représenté fièrement leur unité, rejoints par deux autres Rafale venus de la base aérienne 113 de Saint-Dizier, spécialement dépêchés pour le Rafale Solo Display, véritable vitrine dynamique du chasseur français. La base aérienne de Nancy a apporté sa contribution avec un Mirage 2000D, tandis que la formation de chasse s’est enrichie de la présence de deux PC-21 en provenance de Cognac, accompagnés d’un Alphajet. Parmi les surprises de la journée, un Mirage 2000N de la Direction Générale de l’Armement (DGA) a su captiver les passionnés par son profil unique et son histoire particulière.
Pour cette occasion exceptionnelle, un Mirage 2000C a revêtu une décoration spéciale, fruit d’une collaboration créative avec Régis « Rage » Rocca, artiste renommé à l’origine de nombreuses livrées remarquables appliquées sur Rafale. La mise en peinture de ce bijou a été réalisée par HB Radical Design, avec le précieux concours des « choumacs », ces experts carrossiers du 2/5, qui ont su sublimer le travail artistique. Baptisé « Gusto 80 », ce Mirage 2000C affichait une livrée hors normes, immédiatement devenue la star incontestée de la journée. Son design audacieux a suscité l’admiration de tous, attirant tous les regards lors de son apparition.
Le point d’orgue de l’après-midi fut une démonstration tactique en vol, le « Gusto Tactical Display », durant laquelle le « Gusto 80 » a évolué aux côtés d’un autre Mirage 2000C. Cette prestation dynamique a mis en lumière les capacités opérationnelles et la synergie de ces avions légendaires, offrant un spectacle aérien de haute volée dans le ciel d’Orange, pour le plus grand plaisir des spectateurs.
Le 14 octobre dernier, cet anniversaire symbolique coïncidait également avec les 70 ans de l’escadron sur la base aérienne 115. Une journée riche en émotions, ponctuée par le rassemblement des anciens pilotes et membres de cette prestigieuse unité, ainsi que par la présence de nombreux escadrons français. Environ cinquante aéronefs ont été exposés, témoignant de la diversité historique et technologique de l’armée française : du Mirage 2000N de la DGA au mythique Skyraider désormais en privé, sans oublier un Canadair de la Sécurité Civile. La dimension internationale n’a pas été oubliée, avec la venue d’appareils étrangers prestigieux, notamment le F-16 Solo Display de la Belgian Air Force, le F-16 Solo Display danois, plusieurs F-16 néerlandais, ainsi que l’EF-2000 Eurofighter britannique.
Dans la continuité des équipes temporaires telles que les « Requin Mike » de Mont-de-Marsan, les « Maraud Fox » de Luxeuil, les « Couteau Delta » de Nancy, les « Vautour Bravo » de Saint-Dizier ou encore les « Mustang X Ray » de Cognac, le 2/5 a également eu l’honneur de disposer de sa propre démonstration tactique à deux appareils. Ces formations sont créées afin de présenter au public les missions, les tactiques et les capacités des unités et de leurs personnels, dans un cadre à la fois pédagogique et spectaculaire.
La patrouille baptisée « Gusto Tactical Display » met en scène deux Mirage 2000C en configuration « Fox » (avec un unique bidon ventral), dans une démonstration dynamique d’environ 12 minutes. Après ses passages remarqués à Salon-de-Provence en juillet, Melun en septembre et Gap en octobre, la patrouille « Gusto » a illuminé le ciel lors du 80ème anniversaire de l’« Île-de-France » sur la base aérienne 115, offrant un spectacle à la hauteur de la légende de cet escadron mythique.
Du Mirage 2000 au Rafale : une transition majeure pour l’Escadron de Chasse 2/5 « Île-de-France »
L’Escadron de Chasse 2/5 « Île-de-France » s’apprête à vivre un tournant historique. En effet, cet escadron emblématique sera mis en sommeil à partir de juin 2022, marquant la fin progressive de son ère Mirage 2000. À compter de cette date, les équipages seront progressivement transformés pour opérer sur Rafale, avec pour objectif de recréer un escadron doté de ce chasseur de dernière génération sur la base aérienne 115 à partir de juillet 2024.
Le retrait des Mirage 2000C français du service actif est programmé pour l’été 2022. Parallèlement, les sept derniers Mirage 2000B, des appareils biplaces exclusivement dédiés à la formation des pilotes, seront transférés de la base d’Orange vers Nancy-Ochey à la même période. Ces appareils continueront d’assurer la formation des équipages sous l’égide de l’Escadron de Chasse 2/3 « Champagne ». Le retrait progressif des Mirage 2000B devrait quant à lui s’étaler jusqu’à l’horizon 2029, en cohérence avec la diminution des effectifs pilotes affectés aux escadrons Mirage. Le dernier Mirage 2000B quittera probablement le service courant 2032.
Ainsi, après près de quarante années de service au sein de l’Armée de l’Air et de l’Espace, les jours des Mirage 2000C sont désormais comptés. Le « 2/5 » sera mis en sommeil au moment du transfert des équipages sur Rafale, avec une possible réactivation prévue entre 2023 et 2024 sur la BA 115. D’importants travaux d’infrastructure sont d’ailleurs déjà programmés sur la base d’Orange afin de préparer l’accueil des Rafale. Lors de cette transition, les treize derniers Mirage 2000C seront progressivement retirés du service, tandis que les sept Mirage 2000B rejoindront l’EC 2/3 « Champagne » à Nancy-Ochey, prenant ainsi la relève dans la formation des pilotes, notamment après la dissolution en mai 2021 de l’EC 4/3 « Argonne », qui avait auparavant cette responsabilité pour le Mirage 2000D.
À la mi-2022, l’Escadron 2/3 « Champagne » reprendra donc la totalité de la formation des équipages Mirage 2000, incluant également les futurs pilotes du Mirage 2000-5F, parfois surnommés les « chasseurs aux yeux bleus » des Cigognes. Cette nouvelle organisation garantit la continuité des savoir-faire jusqu’au retrait complet des Mirage, prévu vers 2036.
Pour mieux comprendre l’importance de cette transition, voici un aperçu de l’inventaire des Mirage 2000 au 31 décembre 2021 en France :
-67 Mirage 2000D (version biplace spécialisée dans l’attaque au sol)
-28 Mirage 2000-5F (version monoplace modernisée dédiée à la supériorité aérienne)
-12 Mirage 2000C (version monoplace classique de chasse)
-7 Mirage 2000B (version biplace utilisée pour la formation)
-28 Mirage 2000-5F (version monoplace modernisée dédiée à la supériorité aérienne)
-12 Mirage 2000C (version monoplace classique de chasse)
-7 Mirage 2000B (version biplace utilisée pour la formation)
Au total, cela représente 114 appareils. Il est intéressant de noter que la version biplace, bien que essentielle pour la formation, possède quelques limitations techniques : elle embarque environ 110 litres de carburant en moins que la version monoplace et ne dispose pas de canons internes, ce qui en fait un avion principalement destiné à l’instruction.
Ainsi s’amorce une nouvelle page de l’histoire aéronautique française, où le Rafale prendra progressivement la relève des Mirage 2000, assurant la continuité opérationnelle et technologique de l’Armée de l’Air et de l’Espace pour les décennies à venir.
Un grand merci à l'Escadron de Chasse 2/5 "Île-de-France" pour l'invitation à cette prestigieuse journée.