Les Forces Aériennes Tchèques ont sont de retour dans le ciel Pyrénéens pour mener à bien Mountain Flight 2023, un exercice annuel visant à perfectionner les compétences de vol en région montagneuses de leurs pilotes.
L'histoire de Mountain Flight
Cette exercice annuel se déroule à Sainte Léocadie depuis plus d'une quinzaine d'années maintenant. Située à près de 1500 mètres d'altitude et entourée de sommets avoisinants les 3000, cette base frontalière accueille le Centre de Vol en Montagne (CVM) qui à pour objectif de permettre aux pilotes de voilures tournantes de s'entrainer à la pratique du vol en montagne et tout ce qui va avec : le vol en haute altitude et la proximité avec le relief qui vont mettre le pilote et sa machine à rude épreuve. Il est également possible de s'entrainer aux posés en terrains difficiles grâce à la vingtaine de points de posés potentiels dans les environs de la base.
Début 2010, les hélicoptères Mi-171š Hip de la force aérienne tchèque (Vzdušné síly armády České Republiky) effectuent leur première OPEX en Afghanistan. La Task Force Hippo opère alors depuis la base de Sharana dans la province du Paktika, base sise à quelque 2200 mètres d’altitude. Auparavant, au début 2008 et à l’approche de ce premier déploiement, compte tenu des conditions difficiles auxquels ils allaient devoir faire face, il est vite apparu crucial de former ses équipages à la pratique du vol en milieu montagneux. Les conditions de vol au-dessus du territoire Afghan sont, en effet, particulièrement complexes avec des altitudes de travail comprises entre 1 500 et 3 000 mètres et des températures pouvant dépasser les 30°C l’été. Dans le but de former les équipages à opérer dans ces situations extrêmes, la République Tchèque émit le besoin de trouver une zone d’exercice adaptée à ce type d’opération. La France leur proposa rapidement de venir s’entraîner à Sainte-Léocadie, au sein du Centre de Vol en Montagne.
Ce centre, créé en 1960, est spécialisé dans l’enseignement des pratiques et des spécificités du vol en montagne. Chaque année, plusieurs centaines d’équipages français et étrangers y sont formés. Avec des sommets avoisinants qui culminent à plus de 3 000 mètres et des températures chaudes l’été, le site de Sainte-Léocadie présente des conditions climatiques, aérologiques et topographiques assez proches de celles que l’on peut retrouver en Afghanistan. De plus, le centre apporte tout le soutien nécessaire en procurant hébergement, alimentation, connaissance des zones montagneuses, station météorologique, service de sécurité incendie et, surtout un aérodrome doté d’une piste en herbe et d’une tour de contrôle. Les autorités tchèques répondirent donc favorablement à cette proposition et dès septembre 2008, le premier détachement arriva dans les Pyrénées-Orientales, marquant ainsi le début de la coopération entre nos deux pays. Cette coopération perdure depuis lors, puisque les équipages tchèques viennent s’y entrainer chaque année, à peu près à la même période
Outre les pilotes tchèques, mais également allemands, anglais et belges, ce centre est un passage obligatoire pour les jeunes pilotes d'hélicoptères français en formation. Qu'ils se destinent à la marine nationale, l'armée de terre, de l'air ou même pour la gendarmerie, sécurité civile et douanes, ils passeront tous quelques semaines à profiter de ces paysages magnifiques depuis l'EC-120 Colibri d'Héli-Dax qui y est basé à l'année pour assurer leur formation.
L'édition 2023
Cette année, 4 machines furent déployées à Sainte Léocadie : 2 Mi-171sh de l'escadron 222 de Biskajská basé à Námest nad Oslavou, 1 Mi-17 du 243 de Masaryka basé à Prague Kbely, mais également 1 W-3A Sokol du même escadron.
Le détachement tchèque présent était composé d'une cinquantaine de militaires dont des pilotes instructeurs, des jeunes pilotes en formation, des ingénieurs de vol, des "door gunners" et des personnes chargées de la maintenance des aéronefs et du soutien logistique.
Le MI17
L’histoire des voilures tournantes est jalonné de sagas. Des hélicoptères plus ou moins réussis qui ont donné naissance à de nouvelles versions devenues au fur et à mesure du temps de véritables aéronefs à part entière. On pense dans ces cas là bien souvent au Bell UH-1 Iroquois monoturbine américain et à son développement biturbine UH-1N Twin Huey. Ou encore à l’Aérospatiale SA.330 Puma français qui une fois agrandi et musclé donna naissance à l’AS.332 Super Puma puis à l’actuel H225M Caracal. L’Union Soviétique connut également ce phénomène au travers d’un hélicoptère dérivé directement du légendaire Mil Mi-8 mais aux différences moins frappantes : le Mil Mi-17.
C’est au milieu des années 1970 que les militaires soviétiques demandèrent à l’hélicoptériste Mil de développer une version amélioré du Mi-8, qui était alors leur hélicoptère standard d’assaut et de transport de troupes. Dans le cahier des charges figurait notamment des capacités dites de chaleurs et d’altitude. Surtout la nouvelle machine devait être stricto-sensu militaire, le Mi-8 étant fréquemment considéré localement comme un hélicoptère polyvalent en raison de présence en masse au sein de l’Aeroflot. Les premières ébauches furent lancées à la fin de l’année 1975 et un prototype vola en 1976. Il s’agissait en réalité d’un démonstrateur technologique désigné Mil Mi-8M et destiné à être présenté aux forces soviétiques. Au premier coup d’œil il était très difficile de voir les différences entre un Mi-8 et ce nouveau Mi-8M. La principale, visuelle d’ailleurs, résidait dans le rotor anti-couple déplacé sur le côté gauche de l’hélicoptère. Par ailleurs le Mi-8M disposait de protections au niveau des entrées d’air des deux turbomoteurs Klimov TV3-117MT. C’est ceux-là même qui équipaient alors les appareils de lutte anti-sous-marine Mil Mi-14.
C’est en 1977 que l’Armée Rouge fit entrer en service les premiers Mil Mi-8M. Des hélicoptères qui permirent très vite aux forces soviétiques de se réarticuler. Les anciens Mi-8 pour le transport d’assaut et le soutien opérationnel et ces nouveaux Mi-8M pour le transport d’assaut et l’appui tactique rapproché. Dans cette seconde configuration les hélicoptères emportait un armement sur rails externes composé de quatre paniers à 32 roquettes air-sol de 57mm et de quatre missiles antichars filoguidés AT-3 Sagger. Par ailleurs le Mi-8M avait été optimisé dès 1979 dans l’aviation soviétique pour l’évacuation sanitaire. Douze civières et quatre soignants pouvaient embarquer à bord de la version Mi-8MT. En 1980 le Mil Mi-8M fut officiellement proposé à l’export sous la désignation Mi-17. C’est à cette occasion que l’OTAN l’identifia formellement comme hélicoptère à part et lui attribua la désignation de Hip-H. La filiation avec le Mi-8 d’origine était ainsi marqué aussi au sein de l’alliance Atlantique.
Les premiers exemplaires furent versés aux pays satellites de Moscou : Allemagne de l’Est, Bulgarie, Hongrie, Pologne, Roumanie, et Tchécoslovaquie furent les premiers à recevoir des Mi-17 dès 1981. Deux ans plus tard le régime castriste prenait livraison des premiers Mi-17 cubains. Des hélicoptères qui y furent adaptés aux missions de recherches et de sauvetages en mer
Les premiers exemplaires furent versés aux pays satellites de Moscou : Allemagne de l’Est, Bulgarie, Hongrie, Pologne, Roumanie, et Tchécoslovaquie furent les premiers à recevoir des Mi-17 dès 1981. Deux ans plus tard le régime castriste prenait livraison des premiers Mi-17 cubains. Des hélicoptères qui y furent adaptés aux missions de recherches et de sauvetages en mer
Les années 1980 furent celles du Mil Mi-17. La majorité des états marxistes et des nations non alignées voyaient en cet hélicoptère une réponse aux machines occidentales, alors majoritairement américaines et françaises. La Chine, la Corée du Nord, l’Inde, ou encore le Nicaragua en reçurent en quantité très importante. Pour l’Indian Air Force et l’Indian Army il s’agissait d’un appareil capable d’opérer à haute altitude, là où jusque là ne volaient que les Aérospatiale SA.315B Lama et SA.316B Alouette III acquis auprès de la France. Il n’était pas rare de voir voler ces machines ensembles. Au fil de la décennie des dizaines de sous-versions du Mil Mi-17 et de sa version indigène Mi-8M/MT furent développées, tant pour les besoins soviétiques qu’étrangers. Une des plus impressionnantes fut observée pour la première fois par la CIA en mars 1990. Il s’agissait du Mi-17PPA de guerre électronique. En service en Hongrie il reçut la désignation OTAN de Hip-K. Cet appareil en fait était issu du Mi-8MTG en service dans l’Armée Rouge et destiné en cas de conflit est-ouest à brouiller les communications atlantistes.
L’hélicoptériste soviétique devenu désormais russe dut une fois encore se tourner vers l’export. Et dans un monde en totale refonte géographique et politique il arriva à tirer son épingle du jeu. L’Inde une fois de plus fut un client fidèle et important pour le Mi-17. L’Angola, le Pérou, ou encore le Venezuela se tournèrent également vers le Hip-H. Mais ça ne suffisait pas, et Mil fut obligé de fermer une chaîne d’assemblage. L’aéronautique nouvellement russe expérimentait l’économie de marché. Les années 2000 et 2010 furent celles du renouveau du Mil Mi-17. Désormais l’hélicoptère se vendait bien. Même les ennemis d’hier volaient sur cette machine : les forces spéciales américaines en ont utilisés en Afghanistan. Au début des années 2010 l’Aviation Royale Canadienne fit voler quatre Mi-17V connus au sein de sa nomenclature comme CH-178. Eux aussi servaient aux opérations spéciales. La Royal Air Force utilisa également quelque Mi-17, notamment pour des missions d’entraînement. L’un d’eux termina sa carrière au sein de l’Empire Test Pilot School assurant la formation des futurs pilotes d’essais britanniques. Au total une quarantaine de pays utilisait encore en 2020 ou avait utilisé le Mil Mi-17.
Véritable best-seller l’hélicoptère est toujours produit en 2020 sous une version encore plus évoluée appelée Mi-171 et construite désormais par Kazan, au sein du groupe Russian Helicopters. En Russie le Mi-8M et ses versions dérivées ont totalement remplacé les vieux Mi-8 datés de l’ère soviétique.
Le MI171
Le Mi-171Sh est la version d'exportation de l'Ulan-Udes Mi-8AMTSh. Il s'agit de la version d'exportation la plus avancée et peut être armée de divers armements. En plus de transporter des troupes, l’hélicoptère peut également être utilisé pour attaquer les positions ennemies. Les Mi-171SH-HV et Mi-171SH-VN sont des versions plus avancées équipées d'un système FLIR électro-optique et armées de missiles guidés antichar.
La République tchèque et la Croatie ont commandé ces types en 2005 et 2007. L'armée de l'air du Bangladesh et l'armée du Bangladesh exploitent toutes deux des hélicoptères d'assaut armés Mi-171Sh et pour des opérations multirôles. Deux opérateurs récents sont le Pérou qui en a commandé 6, tous dont la livraison est prévue en 2011, et le Ghana qui a reçu 4 hélicoptères en janvier 2013. Une nouvelle commande de la Chine en 2020.
Le W-3 Sokół
Faucon en polonais est le premier hélicoptère à être entièrement conçu et construit en série en Pologne, et est le produit le plus prometteur de PZL-Świdnik. Les travaux sur le projet ont débuté chez WSK PZL-Świdnik en 1973 par l'équipe de Stanislaw Kamiński. Le Sokół a fait son premier vol le 16 novembre 1979, et a depuis été certifié en Pologne, en Russie, en Allemagne et aux États-Unis. À la suite d'un programme de développement assez long, la lente production du Sokół commença en 1985. Les premières ventes de l'appareil se firent en Pologne et dans le bloc de l'Est, avant la chute du communisme - qui permit plus tard à PZL d'élargir ses ventes. En effet, PZL-Świdnik améliora le Sokół initial (W-3) en W-3A, pour tenter d'obtenir les certifications des pays de l'ouest. Le certificat américain FAR 29 a été obtenu en mai 1993, alors que le certificat allemand fut accordé en décembre de la même année.
Le Sokół est de conception classique, avec deux turbomoteurs PZL-10W, qui sont dérivés des PZL-10S - des turbomoteurs TVD-10B russes construits sous licence, qui propulsent les An-28 polonais. Des matériaux composites sont utilisés dans les 3 pales du rotor anticouple et dans les 4 pales du rotor principal.Il est proposé dans un certain nombre de variantes et est capable de réaliser une vaste gamme de missions, comprenant le transport de passagers, de VIP, de fret, mais peut aussi servir d'ambulance aérienne, accomplir des évacuations sanitaires, des missions de recherche et de sauvetage et de lutte contre l'incendie.
La force aérienne tchèque utilise deux versions bien distinctes du W-3A. La première est une variante SAR (Search and Rescue) principalement dédiée à l'évacuation médicale et aux missions de recherche et de sauvetage. Ces appareils sont facilement reconnaissables à leur livrée blanche et rouge qui permet de clairement les distinguer. Ils ont été spécialement aménagés pour accueillir des équipements médicaux et peuvent transporter du personnel médical ainsi qu'un patient sur civière.La deuxième version est destinée au transport et est utilisée dans une grande variété de missions comme le transport de troupes, l'hélitreuillage ou le parachutage. Ces appareils se caractérisent eux par une peinture camouflage trois tons gris/vert. C'est cette variante de Sokol qui était présente cette année pour l'exercice "Mountain Flight 2023".
Cet hélicoptère est conçu pour transporter jusqu'à 12 passagers ou une charge utile pesant jusqu'à 2 200 kg, et il est principalement utilisé pour des opérations de recherche et de sauvetage aérien.
Pendant les deux premières semaines de septembre, les équipages ont suivi un entraînement intensif jours après jours, avec des vols de jour comme de nuit. Les hélicoptères ne coupaient leur rotor que pour refueler, pour les changements d'équipages, 5 minutes sur le taxiway moteur tournant suffisent ! Reste à voir si l'année prochaine les Mi-171 et Mi-17 reviendront ou si les nouveaux Viper et Venom de l'armée tchèque prendront leur place ...
Un grand merci à Julien Gernez de Skywards Reviews pour les informations sur cet exercice, et aux équipages des hélicoptères pour leurs gentillesse.